Rechercher dans ce blog

lundi 3 septembre 2012

Le coup de coeur de Jacques Bertho

Les Bolcheviques contre les « poux de l’ancien régime »

C’est l’histoire d’une longue agonie planifiée, d’une vaste entreprise d’Etat d’élimination : l’éradication par les Bolcheviques des « traîtres » tsaristes mais aussi de leurs familles. Enfants inclus…
Irina Golovkina (1904-1989)
On sait que les Rouges, en se libérant du poids du tsarisme pour instaurer la « dictature du prolétariat », vont produire un régime funeste au rythme de déferlements de terreur, d’assassinats, de procès truqués, de déportations, d’exécutions. Qui vont viser au fil des décennies et des campagnes de purges, des religieux, des scientifiques, des écrivains, des paysans, des Juifs... Mais d’abord les membres de l’intelligentsia tsariste, parfois condamnable, déphasée mais brillante.
« Les Vaincus » est un roman-fleuve qui raconte justement l’itinéraire-témoignage (aucun fait inventé, a assuré l’auteure) d’un cercle familial de nobles parmi tous les « poux de l’ancien régime » persécutés qui composaient cette intelligentsia  très patriote qui va être broyée. Des victimes qui vont subir mille brimades et ségrégations.
Un nom, le passé d’un parent, suffisent à se voir interdit d’emploi (puis accusé de ne pas travailler), interdit d’études, poursuivi, éliminé. Partout, des  « camarades conscients » (jolie formule pour désigner les délateurs) épient les « contre-révolutionnaires », jusqu’au sein des éprouvants appartements communautaires. Alimentés en informations… et mensonges, les gestapistes rouges de la Guépéou tissent une menace permanente, un « règne des ténèbres », « une épouvante froide et sinistre » : accusations, arrestations, folies staliniennes meurtrières, exils vers la misère absolue et la mort glacée sibérienne…
Irina Golovkina (1904-1989), excellente narratrice, fait remarquablement vivre et se débattre une foule de personnages dans ce livre rédigé dans les années 60. Evitant d’idéaliser les victimes dont elle raconte le quotidien souvent tragique, elle nous plonge dans leurs drames poignants, leurs tentatives de résister à la tourmente, de sauver leurs enfants, d’aimer, au fil d’un roman prenant, plein de souffle et d’émotion, aux accents d’épopée forte.

LIRE « Les Vaincus », Irina Golovkina, éd. des Syrtes, 1094 p., 45 €.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire