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vendredi 20 juin 2014

S’abandonner et vivre mille aventures



Benoît fait partie du « peuple des lents ».
Max Genève
Il lit énormément, mais il n’a pas fait de longues études. Employé dans une quincaillerie parisienne, il est couvé par Monsieur Fraysse, le patron, qui lui confie une mission délicate : suivre sa fille unique, Pauline, 17 ans, une chipie qui n’en fait qu’à sa tête et « oublie » de fréquenter le lycée. Benoît se lance dans la filature de la petite peste, bientôt secondé par Félix Belon, un ami du patron, un ancien policier. Ce même Belon qui va entraîner Benoît au MPL, le Mouvement pour le Promotion de la Lenteur, dont il vise la présidence. Benoît adhère, se prend au jeu. Trop, peut-être. Il est jeune, naïf, il ne sait pas que les lents ne sont pas moins pathétiques que les gens « normaux » dès qu’il s’agit de luttes de pouvoir…
Benoît a parfois l’impression qu’un autre jeune homme loge dans son cerveau. Une cohabitation pas désagréable : cet « autre » est « vif, leste, agile, rapide précis dans tout ce qu’il fait ». Un « autre » qui se manifeste dans les nombreuses rêveries de Benoît, pour lui faire vivre d’incroyables aventures dans les mers australes. Un « don » qui va prendre une dimension inattendue, quand à l’occasion de vacances en Espagne où il chaperonne Pauline et son amie Alice – sa future amoureuse -, il rencontre le marquis Heitor de Carjaval Benito Sousa, un aristo excentrique et attachant. Ce dernier voyage également beaucoup dans sa tête, notamment quand il s’installe dans son mystérieux boudoir caché dans un immense globe terrestre…
À quoi sert de courir ? se demande dans son nouveau roman le Mulhousien, « exilé » entre Paris et Biarritz, Max Genève. Mélancolique et joueur, il nous ballade au cœur des « grandes » questions, ou de la seule qui vaille : que faisons-nous de l’espace et du temps qui nous sont donnés durant notre (court) séjour sur Terre ? Max Genève tient une réponse : heureux les innocents aux mains pleines, au royaume de l’imaginaire le (doux) rêveur l’emporte sur l’homme pressé. Une claque au « tout, tout de suite » d’aujourd’hui.
Véronique Cohu
Pour son premier roman, la strasbourgeoise Véronique Cohu a également choisi d’honorer les rêveurs. Son héroïne, Adèle Leduc, une pâtissière installée à Illiers-Combray, dans l’Eure-et-Loir, régale ses clients de ses célèbres paris-brests, notamment les nombreux Japonais fans de Marcel Proust, qui vécut ici dans son enfance (sa tante Léonie y confectionnait ses mythiques madeleines). Adèle avait un don, les rêves prémonitoires. Un don évaporé depuis qu’elle ne dort plus. Sa vie est devenue un enfer, elle est si fatiguée qu’elle ne peut plus travailler. Elle aura tout essayé, la psychanalyse, l’anthroposophie, le jeûne, rien n’y fait. Alors, elle décide de tout plaquer, et de se jeter sur la route, direction plein Est. C’est au fil de trois étapes improbables et savoureuses, deux en Alsace (au mont Saint-Odile et à La Petite-Pierre), une dans les Vosges (à Senones), qu’elle retrouvera la paix intérieure. Et un « métier » bien original, unique sans doute.
LIRE « Le jeune homme qui voulait ralentir la vie », Max Genève, éd. Serge Safran, 224 p., 14,50 €.
« Rêvez… je ferai le reste », Véronique Cohu, éd. Grasset, 180 p., 16 €.

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