Jean d’Ormesson n’est pas à la mode, il s’en accommode sans « rejet ni colère, ni amertume – et aucune illusion. » Il n’est pas à la mode, mais il est désormais culte (le chanteur Julien Doré porte un tatouage à son nom). Il vient d’un monde qui incarnait « le bon goût, la sûreté de jugement, la justesse d’esprit, l’élégance », d’une famille qui rêvait de « grandes choses » et qui n’en réalisait que de petites, et ce monde s’achève avec lui. À 88 ans, il est sur le déclin, alors il pense que la Terre entière décline.
Sa vie, il va raconter sans se la raconter. Ce qu’il
appelle son « fatras », ces « quelques délires », offre
cette merveille d’érudition, de générosité, de simplicité. Le savoir en
partage, une tendre ironie en écharpe. Une toile tissée de son univers à
l’univers tout entier, avec « au-dessus de nous quelques chose de
sacré. » Un roman unique, un chant d’amour à Marie - son épouse -, qui ne
se résume pas. Nous avons préféré en extraire quelques aphorismes dont il a le
secret.
Moderne ?
« Le comble du moderne, c’est à la fois de passer pour rebelle, d’avoir le
pouvoir et d’être plein aux as. »
Facebook.
« Une communion sans Dieu, mêlée de conf
ession. »
Rêver ?
« La seule leçon de l’histoire depuis les temps les plus reculés jusqu’à
hier et aujourd’hui est que nos décisions et nos rêves sont toujours contrariés
par la suite des événements. »
L’argent.
« Un serviteur dont l’idée fixe est de devenir le maître – et il faut l’en
empêcher. »
La vie.
« Une aventure, une crise, un paradoxe et une ironie. »
La mort.
« Survivre à la mort est une illusion. La mort met un terme à la vie. Mais
il y a peut-être autre chose que la vie. »
L’espace et le temps.
« Nous sommes vainqueurs de l’espace qui est la forme de notre puissance.
Nous sommes vaincus par le temps qui est la forme de notre impuissance. »
Le temps (bis).
« Le seul avenir de l’avenir est de devenir du passé. […] Le passé est ce
qui empêche l’avenir d’être n’importe quoi. »
La science.
« La science avance lentement d’erreur en erreur vers quelque chose qui
passe pour la vérité. »
LIRE « Un jour je m’en irai sans
en avoir tout dit », Jean d’Ormesson, éd. Robert Laffont,
260 p., 21
€.