1997. Amélie Nothomb, à la fois auteur et personnage,
cherche un compagnon (en l’occurrence un « convignon ») de beuverie,
mais au champagne s’il vous plaît. Ce sera Pétronille, une fan, charmante
androgyne grande gueule d’une vingtaine d’années, la « convigne »
idéale. Ces deux-là s’amusent beaucoup. Nous, on s’ennuie.
2001. Pétronille Fanto publie son premier roman. Il y en
aura d’autres. C’est une belle histoire d’amitié entre ces deux jeunes femmes.
Au passage, Amélie Nothomb (l’auteur ou le personnage ?) règle ses
comptes : avec les « rombières », avec les paparazzis, avec la
créatrice de mode Vivienne Westwood. Au-delà de cette pacotille, pas de
littérature en vue.
Amélie Nothomb, l’auteur, a peut-être voulu répondre une
bonne fois pour toutes aux sempiternelles questions de ses nombreux admirateurs
sur sa vie, ses goûts, son travail. Et elle a glissé le tout dans un
« roman ». Admettons.
LIRE
« Pétronille », Amélie Nothomb, éd. Albin Michel, 172 p., 16,50 €.
« Il en a fallu des coïncidences et des
hasards », des milliards de combinaisons qui fondent notre Histoire
contemporaine, que Frédéric Beigbeder s’échine à nous raconter à travers le
prisme d’une rencontre improbable et d’un amour impossible, celui d’Oona, la
fille du célèbre dramaturge Eugène O’Neill, avec J.D. Salinger, le futur auteur
du cultissime roman « L’Attrape-cœurs ». Ils se côtoient d’abord au
Stork, LE café branché dans le New York de 1940, là où tout commence, là où
Truman Capote divertit de jeunes et riches héritières. Jerry Salinger,
l’étudiant moins fortuné, un grand timide plutôt maussade, s’amourache d’Oona. À
eux deux, ils apportent « tant de profondeur soudaine au centre de la
légèreté new-yorkaise ». Ils flirtent, se revoient, ne se quittent plus,
pour lui c’est pour la vie, pour elle…
L’entrée en guerre des États-Unis balaie tout. Par défi,
par arrogance, par conviction, on ne sait trop, Salinger s’engage. Il sera de
toutes les horreurs, le Débarquement sur les côtes normandes, l’offensive de la
forêt de Hürtgen – un enfer méconnu -, la libération des camps de la mort. Il
ne s’en remettra jamais, reclus chez lui durant des décennies jusqu’à son décès
en 2010, auteur en fin de compte d’un seul roman et d’une vingtaine de
nouvelles (dont certaines encore inédites). Frédéric Beigbeder invente les
lettres que Jerry aurait envoyées à Oona (il n’a pas eu accès aux vraies). Durant
les années de guerre, celle-ci a rejoint ses amies en Californie, continuant de
mener une vie insouciante, après tout, elle n’a pas encore vingt ans. Elle
aimerait devenir comédienne, elle rencontre Charlie Chaplin, alors en pleine
gloire grâce notamment à sa peinture féroce d’Hitler dans « Le
Dictateur ». Il a toujours aimé les Lolita, mais là, c’est autre
chose : il tombe raide dingue d’Oona, il l’aimera toujours, et elle le lui
rendra bien. Salinger et Oona ne se reverront jamais, sauf encore dans le roman
de Beigebder, était-ce utile, la passion d’un sujet mérite-t-elle une telle
accumulation de détails, une « faction » (mélange de faits réels et
de fiction) gloutonne qui broie l’émotion qu’on espérait éprouver…
LIRE
« Oona & Salinger », Frédéric Beigbeder, éd. Grasset, 336 p., 19
€.
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