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samedi 15 septembre 2012

Le sublime cauchemar de Christine Angot


Vous ouvrez un roman, vous le lisez, vous ne pouvez plus vous en défaire et, à la fin, quand vous le refermez, vous n’êtes plus tout à fait le (la) même. C’est cela la littérature. Une expérience, forte de préférence. Une circulation à grande vitesse, à haute tension, entre la raison, le cœur, les tripes, un truc à vous couper les jambes, ça doit être pour cela qu’on lit assis.
« Une semaine de vacances » de Christine Angot, c’est ça. De la littérature. Un engagement total d’un auteur au service de la vie, de la survie. Qui se sert d’un fil aussi ténu que solide pour tenir sa ligne, c’est son style. Qui se saisit de ce qui se trouve à portée de main (donc beaucoup d’elle-même) pour que nous soyons avec elle, absolument avec elle. Qui se rate, parfois. Qui se sublime aussi, comme ici, même si le sublime est un cauchemar. Et ce cauchemar s’appelle l’inceste, encore et encore, le thème clé du travail de la romancière.
Nous sommes en 1975 (nous le savons par les informations qui annoncent la mort de Franco). Un homme a loué une maison pour passer quelques jours avec une (très) jeune fille (sa propre fille ?). Cet homme semble respectable (il a une bonne situation, une femme, des enfants), érudit (il lit Le Monde chaque jour), bien élevé. En fait, il est tout le contraire. Il est pervers, grossier, manipulateur. Et ces mots ne disent rien de l’abjection de ses actes. Il aime utiliser, humilier, dégrader, usant de son charme damné pour transformer le corps d’une femme en pur objet (de plaisir). Cette adolescente qui n’a pas d’âge, mais qu’on devine avoir une quinzaine d’années, lui est totalement soumise (voir l’extrait ci-dessous), physiquement et mentalement. Elle l’admire, il la détruit. L’éternel enfer des bourreaux. On retient son souffle tant la description de ces jours, de ces heures, de ces minutes est méticuleuse, clinique, effrayante. Tout est mort, jusqu’à cet ultime espoir : s’en sortir par le langage.
LIRE « Une semaine de vacances », Christine Angot, éd. Flammarion, 138 p., 14 €.

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