Avec son éternel visage tendre et adolescent, son pauvre
blouson, ses jeans élimés et ses Converse, on a dû mal à imaginer la violence
qui habite ses romans : John King est un vrai gentil fracassé par la
brutalité de son époque, et attaché à la dénoncer dans ses romans. Avec Will
Self, Nick Hornby ou David Peace, il fait partie de ces auteurs britanniques,
très influencés par la brutalité sociale et policière des années Thatcher, qui
plongent dans le quotidien des « petites » gens pour peindre crûment
la réalité de leur société, un mouvement littéraire qui n’a pas d’équivalent en
France. Il est devenu célèbre avec sa trilogie consacrée à une bande de
hooligans fans de Chelsea (« Football Factory », « La
meute », « Aux couleurs de l’Angleterre ») et il a récemment
rappelé les origines ouvrières du mouvement skinhead (« Skinheads »).
Il revient aujourd’hui avec « White Trash »,
une plongée à la fois glaçante et pleine d’humanité au cœur d’un hôpital public
à travers la confession en parallèle de Ruby, une infirmière dévouée,
« qui aime voir les gens se remettre sur pied, reprendre des
forces », et de M. Jeffreys, un cadre chargé d’optimiser les coûts. Deux
êtres attachés à rendre service, mais avec des mentalités diamétralement
opposées… et dont les chemins vont finir par se croiser. Dans un bain de sang.
Je veux défendre le service public de santé. Je veux dire
à quel point les privatisations malmènent les gens les plus vulnérables. Pour
moi, c’est à nouveau un livre politique, une fable du Bien contre le Mal, Ruby
et son cœur « gros comme ça » contre la logique financière et
élitiste de M. Jeffreys.
Pourquoi ce titre,
« White Trash » ?
C’est une expression américaine qui signifie
littéralement « déchet blanc », désignant à l’origine la population
blanche pauvre, et qui s’applique ici au regard que Jeffreys porte sur les
malades et les employés de l’hôpital. Il affirme qu’il ne toise pas les gens de
haut, mais tout, dans sa logique et ses actes, prouve le contraire.
Sa
« logique » fait penser à un univers totalitaire…
J’ai très peur d’un monde dirigé par des comptables. La
vie a besoin d’émotions, de sentiments, pas d’être rationnelle. C’est pour cela
que je suis opposé à l’Union européenne. Pas aux peuples, mais aux
institutions. Bruxelles est contrôlé par le business, c’est un système
anti-démocratique, hyper-centralisé, une véritable dictature potentielle. Il ne
manque plus qu’un « super leader » au tableau. Oui, totalitaire, car
piloté en sous-main par la finance.
À 54 ans, quid de
vos deux passions, la musique et le foot ?
Le punk est loin aujourd’hui. Et d’ailleurs, je n’en ai
jamais eu le look, je ne pouvais pas me le permettre. Quand tu es supporteur de
foot, tu ne peux pas aller au stade avec les cheveux teints ou une crête !
Au stade, je n’y vais plus guère, l’ambiance a changé, c’est devenu tellement
cher. Mais je ne rate pas un match de Chelsea, chez moi ou au pub avec les
copains. Quant à mes goûts musicaux, et même si David Bowie reste mon idole de
toujours, ils ont évidemment évolué. Je suis assez fan de DJ Shadow ou de Tricky,
par exemple.
LIRE
« White Trash », John King, éd. Au diable vauvert, 384 p., 22 €.
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