Philippe Druillet, géant de la BD de science-fiction,
créateur de « Lone Sloane » et authentique cintré toujours vivant de
70 printemps se raconte. Avec cet autoportrait d’une immodestie jubilatoire –
en gros Georges Lucas et Georges Miller lui doivent tout - on plonge dans l’époque délirante et
destructrice de Pilote, des Humanoïdes Associés et surtout de Métal Hurlant. On
apprend au passage qu’il se prénomme Philippe en hommage à Philippe Henriot, le
patron de la milice française, et ses parents étaient deux abominables crevures
collaborationnistes – c’est lui qui le dit - condamnés à mort par contumace à
la Libération. Il se construit tant bien que mal, plonge dans la BD, et tombe
amoureux de Nicole qui meurt d’un cancer en 1975. Cette fois Druillet plonge
pour de bon dans l’alcool et la dope (il a vendu sa maison pour s’acheter sa
poudre !), coule, ressuscite et se raconte enfin. On en redemande !
LIRE « Delirium »,
Philippe Druillet avec David Alliot, éd. Les arènes, 304 p., 17 €.
Précision : ce n’est pas parce l’on a déjà beaucoup dit
de bien de Craig Johnson dans cette page que l’on n’a pas le droit d’enfoncer
le clou rouillé dans une planche pourrie. Oui, « Molosses », la
dernière aventure de Walt Longmire dans un Wyoming glacé et peuplé de givrés
absolu est un foutu bon bouquin, sec comme un coup de trique, avec une énigme
totalement barrée et un shérif encore un peu plus au bout du rouleau.
L’écriture de Craig Johnson ressemble à un V12 Chevrolet gavé à l’éthanol. Au
démarrage, ça pétarade sec, ça fume, ça crache des flammes, mais alors, quand
le polar décolle, le lecteur peut s’accrocher aux branches jusqu’à la dernière
ligne. On sent qu’il vaut mieux ne pas énerver ce bon vieux Walt Longmire et
son pote indien avec des p’tits meurtres entre amis, du trafic de cannabis à la
noix, des clébards hargneux… et même un perroquet dépressif et déplumé. Non,
faut pas…
LIRE
« Molosses », Craig Johnson, éditions Gallmeister, 336 p., 23,60 €.
Vous ne connaissez pas Hap et Collins ? C’est plutôt
normal, puisque c’est la première traduction des deux héros américains de Joe
R. Landsale. Et là, pour le coup, c’est une sacrée foutue découverte. Deux bras
cassés de la plus belle eau, l’un est noir et homo, l’autre blanc et hétéro
tendance chaud lapin. Le premier a fait le Vietnam et le second de la tôle pour
avoir refusé d’y aller. Les deux sont copains comme cochons et se trouvent
embringués dans une intrigue un peu poussive, digne d’un film de jeunesse de
Tarantino. N'empêche, ça pétouille joliment, ça sanguinole joyeusement sur un
air de Hank Williams – oui, bon, tout n’est pas parfait non plus – et
finalement on s’attache à Hap et Collins comme un pain de plastic mal dosé à
une sous-préfecture corse. Il paraît qu’il y a un gros stock d'autres aventures
des deux lascars à traduire, alors qu’on s’active un peu chez Denoël. Merci.
LIRE
« Les Mécanos de Vénus », Joe R. Lansdale, éditions Denoël, 238 p.,
19,90 €.
En 1852, en Birmanie, le sergent Bowman et quelques
soldats sont choisis pour accomplir une mission pour la puissante East Indian
Company. L’opération vire au fiasco et le sergent passe, avec une poignée de
rescapés, de longues années dans les prisons birmanes. On le retrouve à Londres
six ans plus tard, traumatisé par ce qu'il a vécu et accusé à tort d'un
meurtre. Sur la scène du crime, un mot est inscrit avec le sang du mort :
SURVIVRE… Bowman sait lequel de ses compagnons de captivité a pu commettre
l’assassinat. Des bas-fonds du Londres prolo aux Etats-Unis de la conquête de
l’Ouest, ce soldat perdu, alcoolo, traque le meurtrier. Dans ces « Trois
mille chevaux vapeur », on retrouve tous les codes d’un grand roman d’aventures
et de rédemption. Même si Antonin Varenne n’est pas tout à fait Conrad ou
Stevenson, c’est foutrement bien écrit et passionnant. À glisser dans un sac de plage !
LIRE
« Trois mille chevaux vapeur », Antonin Varenne, éditions Albin
Michel, 554 p., 22,90 €.
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