La sensationnelle et
véridique histoire des sœurs Fox, qui au XIXe siècle dans une Amérique en mal
d'ancêtres et de racines inventèrent le « modern spiritualism »
rapidement popularisé sous le nom de spiritisme. Elles étaient trois. Kate, la
plus jeune, la plus allumée, la plus sincère, encombrée d'un vrai don de
médium ; Margaret, sa complice dépassée qui retombe sur ses pieds en
faisant craquer ses orteils ; Leah, leur aînée de beaucoup, qui a senti
tout le parti à tirer d'une juteuse mise en scène. Esprits frappeurs, tables
dansantes, horloges parlantes... Comme les tables, les sœurs Fox ont toutes mal
tourné et fini par céder à l'appel des spiritueux. Les hommes qui auraient pu
les stabiliser ont disparu trop vite et sans laisser de signes. D'autres en ont
abusé. Le spiritisme était un grand soufflé. Hubert Haddad y revient dans une
évocation animée d'un grand souffle.
LIRE «
Théorie de la vilaine petite fille », Hubert Haddad, éd. Zulma, 398 p., 20 €.
Deux frères. Là où d'autres
se ressemblent comme ce qu'ils sont, ceux-là, tout les sépare. L'aîné, militant
syndical sur le port de Marseille, une petite vie sous le poids des
responsabilités. Le cadet, un chien fou, habitué des mauvais coups et que le poids
des condamnations ne dissuade pas de continuer à mener la belle vie.
L'insouciant vient de se fourvoyer dans un casse sanglant sur le port de
Dunkerque. Les deux frères se retrouvent dans les vagues de la côte atlantique
où sont leurs souvenirs d'enfants. L'un en vacances, avec une femme partie pour
le quitter, l'autre en cavale, pour qui ne comptent plus ses conquêtes
esquintées. Ils sont trop dissemblables pour se comprendre et parvenir à
s'aider. Pour l'un comme l'autre, plus de planche de salut.
Des romans pour ados qui
étaient son domaine, l'auteur ici se jette à l'eau et se lance dans le grand
bain. Magnifique plongeon.
LIRE « Baignade surveillée »,
Guillaume Guéraud, éd. du Rouergue, 125 p., 13,80 €.
Écrivain, journaliste,
correcteur et sur le point de raccrocher, un homme de lettres se jette à corps
perdu dans une dernière œuvre : sur fond de campagne normande, il
entreprend de remonter la piste d'un « chameau ». Non pas l'animal à
deux bosses qui n'a jamais la dalle en pente, mais un pupitre à doubles
plateaux inclinés sur lequel on est deux à bosser. Il en a hérité le jour où
son journal a fermé. Ce chameau, assemblage de bois de récupération, planches
de cercueil ou de tables, mélange de cerisier, châtaignier, houx, frêne et
poirier, lui est un compagnon fidèle. Ils ont traversé ensemble des déserts aux
petites heures et les révolutions techniques qui ont mené à l'écriture
numérique. De registres de notaires en calepins d'ébénistes, l'écrivain piste
la bête et d'un pas lent et poétique, reconstitue un voyage qui, mirage ou
illumination, en vient à croiser la route de Flaubert et de ses illustres
copistes.
LIRE « À
bois perdu », Alain Galan, éd. Buchet-Chastel, 188 p., 14 €.
Ce
qui est bien avec Jacques A. Bertrand, ces derniers temps, c'est qu'il est tout
le temps malade et que plus il est malade, plus il en remplit des livres et que
plus il en remplit des livres, plus il est impayable. Selon les cas, il est
malade de lui-même qu'il n'aime pas ou aime trop, ou malade des autres, qui
sont des sales types, d'incorrigibles croyants ou quelque chose un peu
correspondant. Cette fois-ci, c'est introspectif. Son appareil digestif lui
fait des misères. Rigolez pas, l'affaire est grave. Du pavillon des cancéreux,
la tombe est à deux pas. Le malheureux passe à côté encore une fois, au prix du
sacrifice de quelques pièces détachées. Et relate ça sur le ton qui convient.
Souhaitons longue vie à Jacques A. Bertrand et de nombreuses maladies à venir.
Qu'il en réchappe joyeusement et qu'il en tartine des romans à rechutes. À le
lire, en attendant, on est morts de rire.
LIRE « Comment j'ai mangé mon estomac », Jacques A.
Bertrand, éd. Julliard, 111 p., 14 €.
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